Les hasards d'internet
font parfois bien les choses, il y a quelques années, me promenant
sur la piste de Joseph-Marie Guillam et après avoir lu la mention
d'un embarquement sur un acte, je me mis à rechercher des infos à
propos du bateau sur lequel il avait navigué dont j'avais le nom :
BIESSARD et le parcours effectué. Et là! Oh! chance, je tombe
par hasard sur le rôle d'équipage qui était mis en ligne dans le
cadre de l'expo d'un musée de Bordeaux.
J'aurais voulu joindre à
cet article les données précises que j'avais recueillies,
malheureusement, suite à déménagement, tous mes cartons ne sont
pas encore accessibles. Nous devrons donc nous contenter pour
l'instant de l'histoire de ces hommes aventureux sans plus de
précision sur les dates exactes concernant l'ancêtre de ma fille,
puisqu'il s'agit de son sosa 16.
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Le trois-mâts barque BIESSARD |
Pour résumer,
Joseph-Marie avait trouvé un embarquement à bord de BIESSARD, l'un des grands
voiliers qui partis de France passaient le Cap Horn pour s'arrêter
au Chili puis en Nouvelle-Calédonie afin de rentrer les cales
pleines de minerais.
A BORD
On ne remonte pas
très loin dans le temps : à peine au début du siècle
dernier, mais il s'agit d'une vie extrême que nombre de ces hommes
avaient choisie, recherchée car malgré les risques, malgré les
difficiles conditions de vie, ils étaient appelés par la mer.
On s'imagine des hommes
durs, des baroudeurs ...bien sur, au bout de quelques années, ils
étaient endurcis, mais pour beaucoup le premier embarquement avait
lieu lorsqu'ils étaient encore tous jeunes vers 12 ou 14 ans et si
l'on voit souvent sur les images de vaillants barbus, ils n'ont
généralement pas plus de 30 ans, mais la rude vie du bord les a
buriné.
Concernant Joseph Marie,
son voyage à bord de Biessard l'emmenait faire le tour du monde.
Partis de France, ils faisaient un aller retour vers l'Angleterre
pour charger les cales de charbon avant de s'embarquer pour des mois à destination du Chili où ils
devaient prendre en charge une cargaison de salpêtre.
LE PASSAGE DU CAP HORN
Mais avant d'atteindre le
Chili, la partie la plus risquée du voyage se dressait devant eux :
le passage du Cap Horn. Les conditions de navigation devenaient plus
en plus ardues. Il n'était pas rare qu'au cours des manoeuvres plusieurs hommes soient emportés par une lame qui les jetaient à la mer. La température baissait et les vagues qui se
fracassaient sur le pont gelaient jusqu'à transformer hommes et
navire en statues de glace.
Il ne fallait pas moins
d'une quinzaine de jours à ces voiliers pour réussir à passer le
Cap Horn après d'innombrables et dangereuses manœuvres.
Sur Biessard, lors de la
circumnavigation à laquelle prit part Joseph Marie, le capitaine
était un homme réputé pour sa justesse et qui souhaitait voir ses
hommes correctement nourris, on embarquait à bord de la basse cour vivante et des porcs. Le capitaine demandait aussi à ce qu'un poêle
reste allumé afin que les hommes puissent se réchauffer sous ces
latitudes. Tous n'avaient pas cette largesse.
IQUIQUE
Après avoir vaincu le Cap Dur (surnom donné au Cap Horn pour ses dangers), les marins remontaient l'Amérique du Sud jusqu'à Iquique au Chili : port spécialisé dans le salpêtre.
Les régions d'Antofagasta, Iquique
et Tocopilla étaient les lieux principaux de ramassage du salpêtre
dont l'utilité principale était de servir pour la fabrication de la
poudre à canon même s'il était aussi utilisé dans l'agriculture.
On peut encore voir aujourd'hui les ruines des installations
abandonnées au désert.
Au début du Xxème siècle, la ville d'Iquique était très animée et dans la rade venaient mouiller les nombreux grands voiliers qui transportaient le minerais.
Pour autant, la plupart
des matelots ne descendaient pas du navire au cours du voyage. Les
navires mouillaient dans la rade et le minerais était apporté et
chargé sans qu'il aient à descendre à terre.
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Iquique |
THIO, PORT DU NICKEL
Quittant les côtes du
Chili, les marins mettaient alors le cap vers une petite terre du
bout du monde : La Nouvelle-Calédonie, le port de Thio et son
nickel.
Même si on est loin des périls du Cap Horn, le danger reste présent lors des manœuvres de
ces géants des mers. Quelques années avant le voyage de Joseph-Marie, on trouve trace d'un incident :
Nouméa, 8 novembre
1906, Un navire sur la barrière de corail.
Le navire français
Biessard, chargé avec 300 tonnes de minerai de chrome, a tapé et
s'est échoué sur la barrière de corail en quittant Plum. Le
paquebot français St Antoine a procédé à l'assistance du navire,
et a tenté de la remorquer, mais a échoué. Le navire a fini par se
remettre à flôt de lui-même à marée haute, et fait route pour
Noumea, où il sera examiné par un plongeur. Le Biessard est un navire
de 2253 tonnes, commandé par le capitaine Rault. Il est construit
en acier, et a été lancé en 1900. Il est détenu par une société
française, et son port d'immatriculation est Rouen.
Contrairement aux villes
du salpêtre qui furent abandonnés lorsque l'on trouva de quoi
remplacer cette matière première, à Thio l'extraction du nickel se
poursuit sans discontinuer depuis 1880
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A partir de 1906, à Thio, le téléphérique apporte le minerai au
transbordeur où est amarré un trois-mâts (coll.
M. Gouge paru dans Marc Métayer, Les voiliers du nickel, Alan
Sutton, 2003).
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LE LONG CHEMIN DU RETOUR
Puis quittant la
Nouvelle-Calédonie chargés à ras bord, les bateaux s'en
retournaient par un bien long chemin océanique vers la France. Il ne
fallait en effet pas moins de 6 mois voire plus pour boucler la
boucle.
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Le trajet des voiliers du nickel - Extrait du livre : "Hommes et Navires au Cap-Horn" de Jean Randier |
Pour Joseph-Marie, ce fut
un voyage parmi d'autres rempli de péripéties dont les aventures
racontées lors de trop rares retours au pays venaient exciter la
quiétude d'une petite maison du Morbihan.
Quand à Biessard, le
vaillant trois-mats barque, il disparut en mars 1914, probablement au
large du Cap Lizard (pointe Sud-Ouest de l'Angleterre) lors d'une
tempête d'équinoxe. Après le première guerre mondiale,
l'accélération des progrès techniques et le moteur à vapeur ont
achevé de signer l'arrêt de mort des derniers grands voiliers du
nickel
Sources
sur le salpêtre :
Sources
sur Thio :
Sources
sur le Cap-Horn :
10 commentaires:
Bonjour,
Article passionnant et très bien documenté. Bon challenge à vous, au plaisir de vous relire !
Guillaume
Quelle aventure! J'adore quand le généalogie nous fait voyager :)
Merci à vous Guillaume et Céline, je vois que vous vous êtes levés tôt (certainement pour lire les 70 articles quotidiens du challenge ;-) )...
Je vais essayer de vous trouver d'autres ancêtres voyageurs, malheureusement nombre d'entre les miens étaient de bons paysans bien enracinés sur leur terre.
Et puis on n'a pas toujours la chance de retrouver trace de leurs éventuelles aventures, c'est pour cela que j'ai décidé de reprendre ma généalogie à zéro, histoire de prendre le temps "d'habiller" un peu mieux chaque ancêtre, car une liste de nom c'est bien, mais pouvoir garder trace pour la postérité des péripéties qui ont émaillé leurs vies, c'est mieux.
Bon challenge et bonne lecture.
Emma
J'aime les voyages et grâce à votre article, je suis repartie au Cap Horn ( j'ai eu la chance de le voir). Très bon challenge ! Evelyne de http://www.ciel-mes-aieux.com
Merci pour la découverte de cette lointaine destination... j'adore quand nos ancêtres nous font sortir un peu de leurs campagnes...
Superbe article, c'est fascinant! Je n'ai encore trouvé personne dans ce coin-là, j'espère toujours ;-).
Diane
Très bel article qui nous fait voyager !
Bonjour,
Je prends enfin le temps d'explorer vos articles du ChallengeAZ 2015. Le "A autour du monde" me plait beaucoup, il entre en résonnance avec mes recherches sur mes ancêtres marins.
Je vais vous suivre...
bonsoir ,
pouvez-vous me donner des précisions sur joseph marie Guillam ?
je pense que c est un frère de mon arriere grand-mère .
si il est né en 1877 à Locmariaquer , ce doit etre vrai..
bonne soirée .
béatrice.
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